Dans une tentative de vendre un appartement à 12 millions de dollars à New York, la société immobilière de Donald Trump assiste Roche, l’un des plus grands groupes pharmaceutiques du pays. Cet accord soulève une nouvelle fois des soupçons de conflit d’intérêts pour le 47e président des États-Unis.
Pourquoi l’appartement reste-t-il invendu depuis des années ?
Après plusieurs années passées sur le marché, de manière intermittente, l’appartement situé au 39e étage de la Trump International Hotel and Tower, à Columbus Circle, n’a toujours pas trouvé preneur. Jusqu’à la fin du mois dernier, il était proposé par Sotheby’s, une autre société immobilière, selon les sites spécialisés. Il est désormais listé sur le site de Trump International Realty. Si l’appartement se vendait à son prix actuel, l’entreprise de Trump pourrait empocher plusieurs centaines de milliers de dollars de commission.
Le luxueux appartement de 280 m² a été acheté en 2006 par le géant pharmaceutique suisse Roche, selon les registres immobiliers de New York. Il comprend deux chambres et offre une vue imprenable sur Central Park, ainsi qu’un ensemble de prestations haut de gamme : plafonds laqués avec éclairage intégré, portes coulissantes sur mesure, portes laquées Steinway, plans de travail en Corian, réfrigérateur Sub-Zero, four à convection Wolf, cave à vin et salle de bain en marbre.
On ignore pourquoi Roche, qui possède des bureaux dans tout le pays, a initialement acquis cet appartement, ni pourquoi elle a récemment fait appel à l’entreprise immobilière de Trump. Ni la Trump Organization ni Karina Lynch, avocate du cabinet influent DLA Piper récemment nommée “conseillère éthique externe” de la Trump Organization, n’ont souhaité commenter.
Quelle commission pourrait toucher la société de Trump ?
Bien que ce ne soit pas l’activité la plus rentable du président, Trump International Realty demeure florissante. Selon sa dernière déclaration financière, l’entreprise a généré 2,4 millions de dollars de revenus l’an dernier et dispose d’un « portefeuille de luxe » composé de « biens exclusifs ». Les enfants de Trump détiennent 55 % de la société.
Actuellement, dix propriétés sont en vente à New York, pour un montant total de 42,6 millions de dollars. La majorité se situe dans des immeubles portant le nom Trump. L’appartement de Roche est le plus cher. Vient ensuite un autre bien controversé, évalué à 6,6 millions de dollars, situé dans le complexe Trump Parc. Ce dernier est détenu depuis 2001 par une société enregistrée dans les îles Vierges britanniques, sans que l’on sache qui en sont les véritables propriétaires.
Les commissions immobilières à New York varient, mais la moyenne pour le vendeur est d’environ 2,7 %, selon les sites spécialisés. À ce taux, la société Trump pourrait percevoir jusqu’à 323 000 dollars si l’appartement de Roche était vendu au prix demandé de 11,95 millions de dollars. La vente du bien de Trump Parc pourrait rapporter environ 178 000 dollars supplémentaires. Il reste incertain quelle part de ces sommes reviendrait directement à la famille Trump et quelle part irait aux agents immobiliers travaillant pour Trump International Realty.
Les affaires de Trump influencent-elles sa présidence ?
L’administration Trump exerce un contrôle significatif sur les prix des médicaments et l’approbation des nouveaux produits pharmaceutiques. Roche, de son côté, entretient des intérêts complexes à Washington. L’an dernier, le groupe et ses filiales ont dépensé plus de 10,7 millions de dollars en lobbying, se classant parmi les plus grands dépensiers de K Street.
Au cours du premier trimestre 2025, Roche a déclaré avoir investi près de 3,6 millions de dollars dans le lobbying fédéral. L’équipe interne de Genentech, filiale du groupe, a reçu la majorité de ces fonds. Genentech a également engagé en mars la société Miller Strategies, liée à l’univers MAGA, pour influencer la Maison-Blanche et d’autres agences fédérales. À ce jour, Roche figure parmi les 25 entités ayant le plus dépensé en lobbying tous secteurs confondus, et se classe sixième dans le domaine pharmaceutique.
Malgré les nombreux appels lancés par des experts en éthique, Trump ne s’est jamais séparé de ses entreprises. Ces experts rappellent que toute personne occupant une fonction gouvernementale, à l’exception du président et du vice-président, serait légalement contrainte de se désengager d’une entreprise comme Trump International Realty, en raison des conflits d’intérêts évidents.